Les Affranchies 1 - La belle endormie by Meredith duran

Auteur:Meredith duran [Duran, Meredith]
La langue: fra
Format: epub
Publié: 2018-01-16T16:00:00+00:00

1. Cantique des Cantiques 8 : 6. (N.d.T.)

11

Le brouhaha en provenance du salon se déversait dans le vestibule à l’éclairage tamisé. Revenant d’un bref entretien avec le médium écrivain, mécontent de la chambre qu’on lui avait allouée, Liza marqua une pause et se réfugia derrière une statue en marbre pour écouter ce qui se disait.

Elle reconnut le rire tonitruant de Weston, entrecoupé des commentaires posés de Hollister et de la voix sensuelle de Katherine Hawthorne. Tilney, le pince-sans-rire, lança une remarque étonnamment osée dans la mesure où il n’était encore que… (elle consulta l’horloge de parquet) 19 heures.

La soirée promettait d’être animée. Liza s’arma de son sourire le plus éclatant. Elle devait à tout prix donner l’impression d’être une femme heureuse et insouciante.

L’image que lui renvoyait le miroir accroché au mur d’en face ne la rassura guère. Sa robe était splendide, un chef-d’œuvre composé d’une jupe en soie améthyste assortie d’une sous-jupe et d’une veste en velours violet. Hélas, ces couleurs lui ternissaient le teint. Ou peut-être était-elle fatiguée, tout simplement. À son grand désarroi, elle avait passé une nuit agitée, à rêver d’un homme inaccessible.

— Madame.

Mather venait vers elle dans un bruissement de taffetas. Elle avait fini par accepter de se soumettre aux attentions de la bonne de Liza, allant même jusqu’à l’autoriser à lui boucler les cheveux.

— Vous êtes magnifique, déclara Liza d’un ton chaleureux.

Les rousses ne devraient porter que du vert menthe.

Comme chaque fois qu’on la complimentait, Mather fit la sourde oreille.

— Nous avons un souci concernant l’attribution des chambres. La spirite a su qu’elle avait pour voisin immédiat le médium écrivain. Elle dit que…

— Lui avez-vous expliqué que la chiromancienne et lui sont des ennemis mortels ?

— Oui.

Mather rajusta sa prise sur l’énorme registre qu’elle tenait dans les bras, avant de remonter ses lunettes. Derrière leurs verres d’une épaisseur ridicule, ses yeux bleus paraissaient minuscules, étrécis, presque porcins. Liza lui avait conseillé à d’innombrables reprises de s’en débarrasser, mais elle assurait que sans eux elle serait quasiment aveugle.

— Peu lui importe, enchaîna la secrétaire. Elle affirme ne pas pouvoir dormir si près d’un charlatan.

— Quoi ? Vous plaisantez !

Mather secoua la tête.

Liza poussa un soupir. Elle avait tenu à rassembler tous les médiums dans l’aile opposée à celle réservée aux invités. Après tout, comment prendre au sérieux les prétendus pouvoirs d’une personne qui ronflait ?

Elle n’avait pas imaginé combien ils pouvaient être méfiants envers leurs collègues. Comme un seul homme, chacun lui affirmait que les autres étaient des escrocs et des imposteurs.

— Je ne comprends pas. Quand bien même M. Smith en serait un, où est le problème ? En quoi cela peut-il influer sur les capacités de Mme Augustiana à communiquer avec l’au-delà ?

Mather arqua les sourcils.

— Madame, j’ai le regret de vous annoncer que j’ignore tout de la manière dont Mme Augustiana exerce ses talents.

— Vous ne le regrettez pas du tout, petite impertinente.

Mather cligna des yeux, puis :

— Pas vraiment, je l’avoue.

Liza rit tout bas.

— Oublions Mme Augustiana pour le moment. Sa prestation n’est pas prévue avant vendredi au plus tôt.

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